Et la petite grenouille reaganienne de l'exploitation conservatrice (vigilante et révisionniste du Nâm abondent au catalogue) voulût se faire boeuf hollywoodien.
Passant la seconde (budgétairement), les cousins Golan & Globus ambitionnèrent de faire plus fort que Dino de Laurentiis et de jouer, oui, dans la cour des grands: faire de la firme Cannon une major respectée.
Pour ce faire y aller plein pot dans la SF à grand spectacle, dignifiée depuis une petite décennie par les Lucas et les Scott, donc.
Soit.
Soit, mais personne ne suit les margoulins: pas une star n'accepte l'aventure tragico-romantique de cette vampire de l'espace à oilpé.
Soit encore, mais rien ne marche: impossible de tirer un script potable du roman de Colin Wilson (qui désavoue le film), même pour Dan O'Bannon qui semble ne rien pouvoir proposer d'autre qu'un certain réchauffé autoplagieur alienesque (ou plutôt une façon d'uchronie en fiction: que serait-il arrivé si, finalement, Ripley avait laissé la créature revenir sur Terre ?) et, malgré les 25 millions de $, le titre finit vite par montrer ses limites (un festival de maquettes londoniennes, entre autres).
Reste le savoir-faire d'un Tobe Hooper, loin pourtant de ses antiennes, de ses motifs labyrinthiques et même de ses habituelles ambitions (la sphère intime, familiale, est ici laissée de côté pour une vaste fresque plutôt dépersonnalisée), qui rappelle toutefois qu'il sait cadrer et découper.*
Demeure aussi l'énergie de Mancini, qui manie aussi bien la baguette symphonique que le smooth du jazz rose (son score est cependant assez mal utilisé, trop lyrique en regard de la "modestie" des images).
Et résiste l'indiscutable qualité des effets aussi dérangeants qu'émouvants du starwarsien John Dykstra (le réveil des victimes "asséchées" vous prend volontiers aux tripes).
Mais surtout surnage une foi certaine et une absence totale de cynisme** qui balaye les défauts de ce film passablement imparfait, incohérent et brassant trop large.
Une foi qu'on ne prêtera évidemment pas aux commanditaires opportunistes et paresseux de Lifeforce (sacrés GG !) mais bien aux artisans ayant tenté de ne jamais se trahir malgré les objectifs. Et des trois films que Hooper aura signé pour la Cannon (quand bien même celui-ci ne serait pas le meilleur), aucun n'aura constitué une franche compromission de ses vues***.
* en bon coreligionnaire des Spielberg ou des Dante, il aurait voulu davantage tirer la chose
vers des classiques SF 50's-60's (comme il était parvenu à le faire avec L'Invasion vient de Mars) mais plutôt qu'entretenir un dialogue avec la série des Quatermass de Val Guest et Roy Ward Baker, les GG préfèrent qu'on rentabilise les aréoles de Mathilda.
** Hooper regrettera - à tort - le manque d'humour du produit fini,
mais c'est son sérieux, sa douleur, son masochisme qui le font tenir debout encore aujourd'hui.
*** Massacre à la tronçonneuse 2 et L'Invasion vient de Marsprécèdent cette Etoile du Mal.
Lifeforce(1985), de Tobe Hooper.
Sortie salles françaises: 18 septembre 1985
depuis le 3 juin