
Canicule, 1983/France, canonné par Manchec.
Gravement infusé de l'Erskine Caldwell de La Route au Tabac (pousser jusqu'à Faulkner, ça serait un peu too much !), même si l'affaire tourne à la parodie absurde façon Charles Williams (Fantasia chez les Ploucs), cette ambitieuse allégeance au film de genre à la ricaine ne manque pas - hélas ! - de tôt louper son coche (grief applicable à d'autres Boisset, tel Le Prix du Danger !).
Trop plein d'intentions et de manières pour se contenter du 1er degré nécessaire à pareille entreprise, la production ne tarde pas à se trouver être ainsi un produit hybride, assez courant d'ailleurs dans le paysage frenchy d'alors (Rue Barbare, Diva, certains Mocky jusqu'au Polanski de fin 80's - le casting du film reflètant d'ailleurs très bien cette « couleur » contemporaine (Milo, Kalfon, Dreyfus,...), le cul entre deux chaises insatisfaisantes, hésitant entre hommage et parodie, tiraillé entre franchise dépouillée et envahissante exception culturelle (les dialogues trop écrits qu'Audiard place en bouche de Carmet le nostalgique d'Indochine, le vétéran adagesque du Tonkin).
Proposant une sorte de western désenchanté (un Rio Bravoérotomane et morbide ?), mâtiné de fragrances poissardes empruntées au meilleur du survival 70's (comment ne pas penser à Massacre à la Tronçonneuse ?!), le titre pêche aussi par la mollesse du script (co-signé pourtant par cinq auteurs !!) qui néglige trop vite ses personnages (même les plus travaillés (background poétique et/ou mystérieux) et les plus profonds, tels ceux tenus par Carmet et Miou-Miou*, finissent par être aussi abandonnés par le scenario (dés que Miou-Miou quitte la ferme, son perso parfumé à la femme fatale décalée perd tout intérêt)...
Désamorçant bien trop vite ses enjeux par excès maladroit d'absurde et de poésie à l'européenne (naufrage patent du personnage campé par David Bennent (par ailleurs calamiteux !)), abattant ses cartes avec bien trop de précipitation, sacrifiant ses atouts sur de mauvais plis (le rôle de Bernadette Laffont et, plus encore, celui de l'étrange et suicidaire Muni, sont vraiment tués dans l'œuf), Boisset renonce, gâche et, comme disait ailleurs son dialoguiste, « éparpille façon puzzle » un sujet et un contexte potentiellement valables (le roman originel de Jean Vautrin est-il plus solide ? on tâchera de le savoir).
Pourtant, malgré encore et pour finir une réalisation discutable** (les séquences en ville sont assez faibles, voire carrément et ridiculement merdiques (la fusillade de l'Orléanaise Banque de Beauce***)), le seul fait de voir le minéral et magnifique Lee Marvin, offrir un chant du cygne à ses rôles chez Siegel et Boorman sauve l'affaire pour le cinéphile (ainsi que sa très bonne affiche), préférant le voir ici laisser filer sa fin de carrière que chez Menahem Golan...
* les deux meilleurs du film du coup, fatalement
** on passera sur la délicieusement ridicule (culte ?) partition de Francis Lai,
digne des meilleurs jingles de logos VHS (type Proserpine ou RCV...) !
*** qui paye donc ses culs-terreux céréaliers à grands coups de dollars !
** on passera sur la délicieusement ridicule (culte ?) partition de Francis Lai,
digne des meilleurs jingles de logos VHS (type Proserpine ou RCV...) !
*** qui paye donc ses culs-terreux céréaliers à grands coups de dollars !
Interprètes: Lee Marvin, Jean Carmet, Miou-Miou, Bernadette Laffont, Victor Lanous, David Bennent, Henry Guybet, Jean-Louis Dreyffus, ... Scenario : Jean Herman, Michel Audiard, Dominique Roulet, Serge Korber & Yves Boisset, d'après Jean Vautrin - Image : Jean Boffety - Musique : Francis Lai - Production : Norbert Saada - Réalisation : Yves Boisset. Sortie française: 11 janvier 1984. |